LinkedIn présente la particularité d’être un réseau social personnel, mais utilisé à des fins professionnelles, et au sein duquel le nom des utilisateurs est directement associé à celui de leurs entreprises.
Un employeur peut-il reprocher à son salarié le contenu de ses publications et commentaires sur LinkedIn ?
Les conversations privées sur les réseaux sociaux, non destinées à être rendues publiques, ne peuvent pas justifier de sanction disciplinaire. Si cette jurisprudence « Facebook » est désormais bien établie, les décisions de justice rendues sur la base de propos tenus sur LinkedIn se font plus rares.
Le 31 mai 2024, dans un arrêt n°22/01378, la Cour d’appel de Douai était justement amenée à se prononcer sur le licenciement d’un salarié qui avait publié, sur LinkedIn, des messages que son employeur qualifiait d’abusifs.
Parmi les arguments de défense, le salarié rétorquait que son employeur ne pouvait pas se prévaloir d’un message publié sur son réseau social, puisque cela relevait de sa vie privée.
La Cour a relevé que le réseau LinkedIn avait pour objet de permettre à ses membres d’entretenir des relations entre professionnels, et qu’à ce titre, le salarié était présenté par son nom et son métier. Bien que la publication soit réservée aux relations de premier niveau du salarié, elle « était accessible à des membres LinkedIn du monde professionnel et partageable à l’infini ». Les juges en ont déduit que le message publié sur LinkedIn « ne relevait pas de la protection essentielle de la vie privée ».
Dans une autre affaire, la Cour d’appel de Versailles avait déjà qualifié LinkedIn de « réseau social professionnel public », écartant, elle aussi, l’argumentation du salarié qui rétorquait que ses publications relevaient de sa vie privée (CA Versailles, 28 septembre 2022, n°21/00064).
De même, la Cour d’appel d’Orléans a confirmé la validité du licenciement d’un salarié ayant dénigré, sur LinkedIn, la philosophie et l’organisation de son entreprise (CA Orléans, 30 novembre 2023, n°21/03211).
Ces décisions mettent en lumière le caractère public du réseau social LinkedIn : toute publication peut donner lieu à sanction, dès lors que le salarié tient des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs, qui caractérisent un abus de la liberté d’expression.
Les juges ne se sont pas encore positionnés sur les publications LinkedIn à caractère politique des salariés. Si, en principe, le salarié bénéficie d’une liberté d’expression de ses opinions politiques, aussi bien sur son lieu de travail qu’en dehors de l’entreprise, sur LinkedIn, le nom de son employeur figure directement sous son identité. Reste à savoir si les magistrats considéreront que l’association du nom de l’entreprise à celui du salarié justifie une restriction de sa liberté d’expression en ce qui concerne ses opinions politiques.